vendredi 11 janvier 2008

Journée (dé)constructive

Six heures. Le réveil n'a pas le temps de sonner, je me lève et me dirige mécaniquement vers la salle de bain (j'ai pris soin de déblayer le chemin de mon lit à la douche la veille au soir), je passe un temps incertain sous le jet d'eau qui devrait me réveiller, m'habille, me maquille, ouvre mes volets, vais faire mon lit, prendre mon petit déjeuner. La dernière gorgée de café avalée, j'ai le sentiment d'ouvrir enfin un œil.
Sept heures moins dix, j'extirpe doucement ma fille aînée de son lit, je l'habille et la pose devant son petit-déjeuner qu'elle boudera. Je mets le lait à chauffer, vais chercher la petite qui se réveille à mesure que le niveau du biberon baisse. Je sais qu'elles sont bien réveillées toutes les deux quand elles commencent à s'échanger des gentillesses ("t'as des grosses fesses") ou quand elles s'unissent pour me les adresser. Elles en profitent, je ne suis pas là, j'ouvre leurs volets, je fais leurs lits, je range leurs doudous dans leurs sacs. Elles attendent le moment où je les autoriserai à quitter la table pour regarder dix minutes de dessins animés – le temps de faire la vaisselle.
Huit heures moins le quart, on est déjà en retard, on enfile les manteaux, on grimpe en voiture, on arrive à l'école, un petit bisou et les voilà parties pour la garderie.

Tous les matins, c'est pareil.

Commence ma deuxième vie, celle où je ne suis plus "maman" mais "madame", celle où je n'ai plus deux filles mais des dizaines d'enfants. Ils défilent, alignant plus ou moins lamentablement trois mots d'anglais, entre le cours de sport et celui de math.

Tous les jours, c'est pareil.

Midi et demie, pause-déjeuner. Je rentre me faire réchauffer le restant de pâtes de la veille au soir, que je mange debout dans la cuisine, parce qu'assise face au mur, ça me coupe l'appétit. Un chocolat (faut bien écouler les stocks de Noël !), un café et c'est reparti.

Tous les midis, c'est pareil.

S'il n'est pas aisé de parler anglais en matinée, la tâche est encore plus difficile sur la digestion, après 4 heures d'atelier, ou après cinq, six, sept heures de cours, le dernier jour de la semaine… Mais aujourd'hui, c'est un peu différent : on fait grâce des deux dernières heures de cours pour faire place aux parents. Nouveau travail à la chaîne, où l'on voit défiler, alignant plus ou moins maladroitement leurs propos, les parents qui prennent un peu de leur temps pour se soucier de la scolarité de leur rejeton.
Il y a les parents qui s'inquiètent, les parents qui sont contents, les parents qui en voudraient toujours plus, ceux qui se satisfont de peu, ceux qui ne jurent que par le travail, ceux qui trouvent que "le petit en connaît bien assez pour toucher le chômage", ceux qui admirent leur gosse, ceux qui l'enfoncent, ceux qui vous racontent les années collège de leur enfant, leur propre scolarité, leurs angoisses, leur vie, leur accouchement…
Finalement, à 20h, j'aurai croisé vingt "parents" (en couple ou en solo, accompagnés – ou non – de leur rejeton, parfois de la fratrie, beaux pères, belles mères, pères fouettards ou mère…cenaires – le jeu de mot est foireux, je sais, mais je fatigue !).
Le temps de remettre les tables et les chaises en place, je file chercher les filles. La conversation est d'un autre ordre – jeux, repas, fatigue, pipis-culotte, dessins… On rentre (en oubliant, au passage, les deux doudous sacrés), on enfile les pyjamas, on promet de téléphoner à la nounou demain pour aller récupérer les doudous, on fait un dernier bisou, et on se retrouve en face à face avec son ordinateur…

Heureusement que ce n'est pas pareil tous les soirs.

4 commentaires:

Anonyme a dit…

.. bon samedi : ))

P.S. Peut-être pourrais-tu ouvrir tes volets avant de te maquiller ; )

Anonyme a dit…

Bruno > Pour faire peur aux voisins ???

BZH Matth a dit…

A tous les parents... (parce que ton texte m'a fait penser à ce slam - qui n'était pas encore sorti au moment où tu as rédigé ce billet - surtout le jeu de mot "mère...cenaires").

DdM a dit…

BZH Matth > Excellent choix... excellent slam... excellent artiste... Merci de faire partager !